
Une farce nocturne aux accents baroques : voici l’art de la séduction transformé en comédie grivoise ! Régnier orchestre ici un ballet de la malice où chaque geste révèle les mœurs dissolues du Grand Siècle.
La courtisane, complice espiègle du spectateur par son doigt posé sur les lèvres, s’apprête à enflammer plus que du tabac. Son regard pétillant d’ironie contraste avec l’abandon béat du soldat, figure archétypale du guerrier déchu par les plaisirs terrestres.
L’artiste maîtrise parfaitement le clair-obscur caravagesque : les chairs nacrées émergent des ténèbres dorées tandis que les étoffes rouge sang et ocre jaune vibrent d’une sensualité théâtrale. Sur la table, les cartes éparses évoquent les hasards du jeu et de l’amour. Cette scène de genre, entre morale édifiante et gauloiserie assumée, capture l’esprit libertin d’une époque où l’art savait rire de ses propres conventions.
Pour aller plus loin
- Dormeur réveillé par une jeune femme avec du feu, Nicolas Régnier, début des années 1620
- 101 x 133 cm
- https://collection.nationalmuseum.se/en/collection/item/132616/
- Nationalmuseum, Stockholm, exposé salle 1621, 17e siècle
Nicolas Régnier (1591-1667) incarne parfaitement la génération des caravagesques nordiques. Né à Maubeuge, formé en Flandres, établi à Rome puis Venise, il développe un style personnel mêlant le naturalisme dramatique du maître lombard à une palette plus claire, typiquement flamande. Peintre de la Rome pontificale puis de la Sérénissime, Régnier excelle dans les scènes de genre populaires, alternant sujets mythologiques et saynètes du quotidien avec une égale virtuosité.