Abraham Janssens, Jupiter réprimandé par Vénus

Jupiter réprimandé par Vénus, d'Abraham Janssens, vers 1612
Jupiter réprimandé par Vénus, d’Abraham Janssens, vers 1612

Abraham Janssens orchestre un drame olympien d’une intensité saisissante. Au centre, Jupiter, divinité suprême, se voit réprimandé par une Vénus impérieuse drapée d’écarlate.

Le corps du dieu, à la musculature héroïque traitée avec une sensualité toute baroque, s’affaisse légèrement sous le poids du blâme, tandis que son visage exprime une humeur mêlant contrariété et résignation.

La composition s’articule autour de ce face-à-face divin, enrichi par la présence d’autres immortels qui assistent à cette scène inhabituelle. Les drapés somptueux – pourpre, or et vermillon – contrastent avec la chair nacrée des protagonistes, créant une harmonie chromatique d’une grande richesse. Le traitement virtuose des anatomies, la théâtralité des poses et l’expressivité des visages témoignent d’une maîtrise technique exceptionnelle. Le paon aux pieds de Jupiter et l’aigle à ses côtés rappellent ses attributs traditionnels, tandis que la lumière dramatique sculpte les corps avec une vigueur toute caravagesque.

Pour aller plus loin

Abraham Janssens (1575-1632), figure majeure de l’école flamande au début du XVIIe siècle, fut le principal rival de Rubens sur la scène artistique anversoise. Son séjour romain de cinq ans imprégna durablement son style, lui permettant d’assimiler les leçons des maîtres italiens et de l’Antiquité.

Dans ce tableau peint vers 1612, on reconnaît l’influence de Raphaël, notamment de ses fresques de la Villa Farnesina, mais Janssens y insuffle une puissance physique et une tension dramatique proprement flamandes. Sa capacité à marier le classicisme italien à la sensualité nordique fait de lui l’un des pionniers du baroque flamand, dont l’importance historique, longtemps éclipsée par le génie de Rubens, mérite aujourd’hui d’être pleinement reconnue.