
Femmes au chien de 1891 illustre parfaitement l’esthétique révolutionnaire du jeune Pierre Bonnard, alors membre actif du mouvement Nabi.
Cette œuvre intimiste dépeint sa sœur et sa cousine jouant avec le chien familial dans un jardin, scène domestique transformée en manifeste décoratif. Bonnard expérimente ici une approche radicalement moderne : compression spatiale, simplification des formes et aplatissement des volumes créent une surface picturale audacieusement bidimensionnelle. Les motifs vestimentaires deviennent éléments ornementaux abstraits, tandis que les silhouettes flottent dans un espace indéterminé aux verts acides. La technique mixte révèle l’esprit expérimental de l’artiste : dessins au crayon et à l’encre affleurent sous la peinture, parfois gravés directement dans la matière colorée. Cette synthèse entre observation du réel et stylisation décorative témoigne de l’influence des estampes japonaises et de l’esthétique symboliste. Les trois personnages esquissés à l’arrière-plan renforcent cette impression de spontanéité créatrice, caractéristique de cette période d’effervescence artistique.
Pour aller plus loin
- Pierre Bonnard, Femmes au chien, 1891, huile et encre sur toile. Clark Art Institute, acquis par le Clark, 1979.23
- 41 x 32.5 cm (16 1/8 x 12 13/16 in.)
- https://www.clarkart.edu/ArtPiece/Detail/Women-with-a-Dog
Pierre Bonnard (1867-1947), surnommé le « Nabi très japonard », révolutionne l’art moderne français par sa vision coloriste et décorative. Cofondateur du mouvement Nabi aux côtés de Vuillard et Sérusier, il développe dès 1890 un style personnel synthétisant influences post-impressionnistes et esthétique japonisante. Maître de l’intimisme bourgeois, il transcende l’anecdote quotidienne par une approche chromatique d’une audace croissante. De ses débuts nabis aux splendeurs méditerranéennes de sa maturité, Bonnard demeure l’un des coloristes les plus inventifs du XXe siècle, ouvrant la voie à l’art moderne par sa modernité décorative et sa sensibilité lumineuse exceptionnelle.