Dans « Madame Pompadour » (1915), Modigliani nous dévoile un portrait d’une élégance austère et d’une modernité saisissante.
Le visage allongé, caractéristique de son style, est traité dans une palette chaude où le rose saumon contraste avec le noir profond du chapeau et du vêtement. Ce jeu chromatique, appuyé par un fond grisâtre structuré de lignes verticales et horizontales, confère à l’œuvre une tension mystérieuse. Le traitement géométrique et la stylisation du visage – yeux en amande, nez effilé et bouche réduite à un simple trait – témoignent d’une synthèse audacieuse entre les influences cubistes et l’art primitif africain. L’apparente simplicité cache une composition savamment orchestrée où la verticalité du cou élancé répond à la robustesse du chapeau, créant une tension formelle qui captive le regard. Le modèle pourrait être Beatrice Hastings, la maîtresse de Modigliani à cette époque.
Pour aller plus loin
- Madame Pompadour, de Amedeo Modigliani, en 1915
- 61.1 × 50.2 cm
- The Art Institute of Chicago, Art moderne, galerie 391
- https://www.artic.edu/artworks/27281/madam-pompadour
Amedeo Modigliani (1884-1920) incarne le génie tourmenté de la bohème parisienne du début du 20e siècle. D’origine italienne, il s’installe à Paris en 1906 où il côtoie l’avant-garde artistique tout en cultivant un style profondément personnel. Consumé par l’alcool et les drogues, il mène une existence incandescente qui s’achève prématurément à 35 ans. Cette œuvre, réalisée en pleine Première Guerre mondiale, appartient à sa période de maturité artistique.
Après avoir abandonné la sculpture pour des raisons de santé, Modigliani concentre alors son expression sur la peinture, développant une manière unique reconnaissable entre toutes. Ses portraits, marqués par ces visages ovales aux cous démesurés et aux yeux souvent vides, traduisent une vision à la fois mélancolique et intemporelle de ses sujets, transcendant l’individualité pour atteindre une forme d’universalité poétique.