
« Moïse et Aaron devant Pharaon : une allégorie de la famille Dinteville » (1537) illustre l’art du portrait allégorique à la Renaissance française, mêlant récit biblique et histoire contemporaine.
Les cinq frères Dinteville, nobles influents de l’entourage royal, se mettent en scène sous les traits des protagonistes de l’Exode : Moïse et Aaron implorant Pharaon de libérer le peuple hébreu. Cette transposition révèle une stratégie de réhabilitation sociale après le scandale qui vit Gaucher de Dinteville accusé d’outrage aux bonnes mœurs, entraînant l’exil familial. L’artiste déploie une technique flamande minutieuse dans le rendu des étoffes somptueuses, des carnations et des expressions. Le serpent d’Aaron, bâton métamorphosé pour défier les magiciens égyptiens, symbolise la transformation espérée de leur disgrâce en faveur divine. Cette composition théâtrale témoigne de l’usage politique de l’art religieux, où l’iconographie sacrée légitime la demande de pardon royal par l’intercession biblique.
Pour aller plus loin sur Moïse et Aaron devant Pharaon : une allégorie de la famille Dinteville
- Moïse et Aaron devant Pharaon : une allégorie de la famille Dinteville, par le Maître de l’allégorie Dinteville, en 1537
- 176.5 x 192.7 cm (69 1/2 x 75 7/8 in.), huile sur bois
- The Metropolitan Museum of Art, Fifth Avenue, New York, exposé galerie 612
- https://www.metmuseum.org/art/collection/search/437217
Le Maître de l’allégorie Dinteville, néerlandais ou français, demeure une figure anonyme du 16e siècle, probablement actif dans l’entourage de Fontainebleau. Son surnom dérive de cette œuvre exceptionnelle, rare témoignage de sa production connue. Sa technique révèle l’influence des primitifs flamands et de l’art de cour français, caractérisée par un réalisme psychologique aigu et une maîtrise consommée du portrait de groupe. Cet artiste sut allier innovation iconographique et tradition picturale pour créer une œuvre d’une rare complexité narrative, où se mêlent habilement politique, religion et stratégie familiale.