
Théâtre allégorique de l’ambition féminine : un spectacle saisissant ! Dans ce tableau attribué à Königsmarck, l’artiste orchestre un véritable opéra visuel où se mêlent portrait, autoportrait et allégorie savante.
A droite de cette composition virtuose, l’artiste se présente tenant le portrait d’Ulrika Éléonore, affirmant son statut de peintre officielle. À gauche, Fama, la déesse de la rumeur, déploie ses ailes majestueuses, trompette levée pour proclamer les gloires royale et artistique.
Cette mise en scène audacieuse révèle une stratégie de légitimation remarquable : l’artiste ne se contente pas de peindre, elle théorise son art. Les drapés somptueux – bleu outremer royal, pourpre impérial – et la gestuelle théâtrale créent une symphonie chromatique d’une élégance raffinée. L’éclat nacré des carnations contraste avec les ombres mystérieuses, technique héritée du caravagisme nordique. Cette œuvre constitue un manifeste : l’art féminin revendique sa place dans le panthéon culturel européen.
Pour aller plus loin
- Allégorie avec autoportrait et portrait de profil d’Ulrika Éléonore l’Aînée, par Amalia von Königsmarck, en 1689
- 101 x 120 cm
- https://collection.nationalmuseum.se/en/collection/item/132604/
- Nationalmuseum, Stockholm, exposé salle 1662, 17e siècle
Amalia von Königsmarck (1663-1740) révolutionne l’art suédois par son audace créatrice. Aristocrate éclairée, elle transcende les conventions sociales pour embrasser une carrière artistique professionnelle inédite en Scandinavie. Formée selon les canons italiens et flamands, elle maîtrise autant la technique du portrait d’apparat que la complexité allégorique. Protégée de la cour royale suédoise, Königsmarck développe un langage pictural personnel, mêlant influences européennes et sensibilité nordique, ouvrant ainsi la voie aux générations d’artistes femmes scandinaves.