
Dans ce théâtre végétal envoûtant, le Douanier Rousseau donne une vision fantasmagorique de la jungle, où la nature règne en souveraine absolue.
La composition profondément onirique, nous plonge dans un univers luxuriant où chaque feuille semble avoir été méticuleusement dessinée. Au centre de cette symphonie de verts profonds, un lion dévore sa proie avec une étrange sérénité. La lune, disque parfait posé à l’horizon, baigne la scène d’une lumière bleutée qui confère à l’ensemble une atmosphère de conte nocturne. Les fleurs exotiques – touches de blanc immaculé, de bleu cobalt et de jaune solaire – ponctuent cette dense végétation comme autant de notes mélodiques dans une partition sylvestre. Rousseau parvient ici à transmuter une scène de prédation naturelle en vision métaphysique, où la beauté sereine du monde sauvage transcende sa violence intrinsèque.
Pour aller plus loin
- Le repas du lion, par Henri Rousseau, dit le Douanier, en 1907
- 113.7 × 160 cm (44 3/4 in. × 63 in.)
- The Metropolitan Museum of Art, Fifth Avenue, New York, exposé dans la galerie 825
- https://www.metmuseum.org/art/collection/search/438822
Henri Rousseau, dit le Douanier (1844-1910), incarne l’une des trajectoires artistiques les plus singulières de l’histoire de l’art moderne. Autodidacte complet, n’ayant jamais reçu de formation académique ni voyagé hors de France, cet ancien employé de l’octroi parisien commence à peindre tardivement.
Sa peinture, initialement moquée pour sa naïveté apparente, fascine progressivement l’avant-garde artistique pour son extraordinaire puissance imaginative et sa liberté formelle. Rousseau élabore un style profondément personnel, caractérisé par une facture méticuleuse, des couleurs vives et planes, et une vision idiosyncrasique du monde. À sa mort dans la pauvreté, Rousseau laisse une œuvre qui, par son authenticité radicale et sa poésie visionnaire, s’impose comme l’une des plus originales de son temps.